Par KADATH, décembre 2008
Gabriel Delmas est né en 1973 et reconnaît sa filiation avec des dessinateurs comme Druillet, Mignola, Corben. Elève de la faculté de lettres et des arts décoratifs à Paris, il a travaillé dans le domaine de la peinture puis de l’art vidéo. Il est considéré aujourd’hui comme le spécialiste de la démonologie et du satanisme en bande dessinée. Delmas se reconnaît dans les mythiques Chants de Maldoror de Lautréamont mais aussi dans les oeuvres des grands écrivains fantastiques tels Baudelaire, Lovecraft ou encore Blackwood. Côté peinture, les univers tourmentés de Goya, Géricault et Bacon ainsi qu'une pléiade de films d'horreur ont leur part de responsabilité dans les décors qu’il dessine.
On lui doit notamment les albums suivants : Le psychopompe en 2002 (très sombre, oeuvre marquée par le satanisme), les deux tomes de Totendom (excellente contribution à un héroic-fantasy sur fond d’histoire de France) et L’extravagant Monsieur Pimus en 2006.
Sur une terre inconnue qui ressemble au nord de l’Europe, les hommes du village d’Enen sont massacrés par des créatures mystérieuses. Le sorcier des montagnes et le guerrier Gunmord partent en guerre pour venger leur mort. Leur poursuite les amène vers un ancien volcan et la “montagne chauve” où dorment les temples de civilisations disparues. Là ils découvrent l’horreur qui gît entre les crevasses gelées de la montagne. Car entre les momies étranges et les tours en ruines, tout n’est pas mort…
Si l’idée de base du scénario est bonne, le dessin de Delmas ainsi que les textes sont fort décevants. Ce qui frappe avant tout est le ton brun sombre qui domine cet album, trop rarement distrait par quelques éclats de bleu pâle en scène d’extérieur. L’emploi de l’informatique donne un côté trop formalisé à l’ensemble des planches. Le manque de détails des décors et des personnages met d’autant plus en évidence le côté impersonnel du graphisme. Gabriel Delmas est un adepte du black metal sataniste, celà se voit à l’aspect des visages gothiques jusqu’à la caricature. La plupart des personnages sont des masques inexpressifs aux yeux cernés de noir - tout est trop noir dans cet album - aux attitudes désespérément figées. Par contre la représentation des temples perdus dans la montagne est très surprenante. Ces immenses murs dominés par des crânes créent une angoisse véritable. Cette ambiance morbide accompagne le lecteur jusqu’à la découverte des momies, scène évocatrice d’un fantastique proche de HPL. Ces quelques dessins sont d’ailleurs de loin les meilleurs de l’album ! Les dialogues sont lourds et franchement ennuyeux, tout comme le rythme narratif, lent et répétitif sur le thème du mal qui semble obséder Delmas.
En conclusion, Ceux qui rampent mérite une lecture compréhensive des qualités et des défauts en tenant compte de la volonté de l’auteur de nous présenter une histoire d’un fantastique sombre. Si l’architecture des temples et certaines scènes de paysage sont bien rendues, l’ensemble de l’oeuvre baigne dans un morbide trop figé, peu imaginatif et inexpressif pour vraiment convaincre le lecteur.