2007, sous la direction de S.T. Joshi, éd. La Clef d'Argent.
En 1986, à la suite d'un débat par fanzines lovecraftiens interposés, s'est tenu une discussion à cinq voix durant la World Fantasy Convention de Providence. Cinq voix, cinq experts de H.P. Lovecraft ont défendus et confrontés leurs points de vue sur le “Mythe de Cthulhu”, ce qu'il est est et ce que cette appellation d'August Derleth suggère. La Clef d'Argent propose ici l'intégral du débat dans un petit livre court mais très attrayant et au propos dense.
Les interlocuteurs en présence, Donald R. Burleson, Will Murray, Robert M. Price et David E. Schultz, était réunis autour de S.T. Joshi. Depuis 1986, l'étude de la littérature de Lovecraft a évoluée, notamment grâce à l'analyse de son impressionnante correspondance mais ce débat est un élément clé, une sorte de point d'ancrage d'un renouveau post-derlethien. Car il faut bien l'admettre, si Derleth a fait connaître Lovecraft au plus grand nombre, il a aussi sapé pour des années son travail, en s'autoproclamant successeur de HPL et en travestissant son œuvre par ses propres textes mais aussi en décidant de ce qui composait ou non le Mythe, faisant de Lovecraft un gourou malgré lui.
Définir ce fameux Mythe de Cthulhu n'est donc pas chose aisée. La discussion présente plusieurs points de vue, qui tous se rejoignent pour admettre que les textes de Lovecraft, s'ils sont bien liés par des éléments communs, n'étaient peut-être pas aussi proches d'être un tout, un cycle. Il s'agissait peut-être plus largement d'une certaine vision du monde par HPL. Cette vision ne pouvait pas être partagé par d'autres auteurs, tout au plus les inspirait-elle à travers les monstres de Lovecraft. N'est-il pas plus juste comme le suggèrent les intervenants de parler de “mythe de Lovecraft”, englobant ainsi ses histoires, sans devoir sacrifier à l'inclusion d'autres textes hommages mais pas essentiels.
Un autre point de débat est d'analyser jusqu'à quel point Lovecraft a su jouer avec les codes et tranformer sa propre oeuvre en intégrant certaines créations de ses amis et par son attitude de gentleman à ne jamais critiquer négativement, poussant ainsi malgré lui de jeunes auteurs à le plagier (qui a dit Derleth ?). Joshi déclare a un moment que les lettres de Lovecraft sont à certains égards bien plus fascinantes et riches que son oeuvre littéraire.
Le débat est vaste, il n'est pas question de le résumer ici. Vous l'aurez compris, on a là un ouvrage indispensable, plaisant à lire et incontournable pour tout amateur de Lovecraft.
La conclusion de cette courte critique peut se trouver sur le site de l'éditeur :
“Enfin, si par la force des choses “Qu'est-ce que le Mythe de Cthulhu ?” n'apprendra finalement que peu de choses au lecteur en ce qui concerne le développement du Mythe de Cthulhu postérieur à 1986 (il y est tout de même fait allusion en notes), il demeure néanmoins un ouvrage de référence sur la genèse du Mythe, et, nous l'espérons, un complément à l'excellent “Guide du Mythe de Cthulhu” de Patrice Allart paru aux éditions Encrage.”