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#1 2012-02-05 13:59:56

Schizodoxe
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From: Bordeaux
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"The problem with escapism…"

Cet article fort court mais très stimulant m'inspire cinq remarques.

1. Je pense que le plaisir de la lecture réside d'abord et avant tout dans la virginité à l'égard du texte. La lecture au premier degré est, selon moi, la lecture la plus agréable. De ce fait, on ne doit chercher les significations cachées du texte (en l'occurrence son sens politique) que lorsque cette lecture innocente n'est plus possible.

2. Cette lecture seconde (seconde chronologiquement et logiquement) peut être une source de plaisir nouveau. Mais elle ne doit pas se borner au domaine politique. Surtout lorsque le politique est entendu au sens étroit du marxisme moderne (tout s'éclairant à la lumière de la lutte des classes (la dénonciation de l'oppression des classes inférieures par les classe supérieures étant de plus en plus formalisé comme étant l'oppression des non-blancs par les blancs)). Elle ne doit pas non plus sombrer dans le psychologisme, dans la réflexion sur la génétique éditoriales, etc. Aucun de ces points ne doit être occulté ; certains peuvent même être privilégiés, mais il faut se garder du réductionnisme.

3. L'idée que tout est politique est une idée dangereuse et stérilisante. Elle est dangereuse dans le domaine social et politique (cf. ce maire UMP qui veut épurer les contes de fées jugés trop réactionnaires pour être lus par des enfants), mais aussi stérilisante pour ce qui est de la création : les romans à thèse ne sont que rarement des réussites. "On ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments", la phrase est connue. Plus généralement, on ne fait pas de bonne littérature lorsque le but de d'écriture (qui peut être inconscient chez l'auteur) n'est pas l'écriture elle-même, mais la défense d'un point de vue.

4. L'idée que tout est politique crée un écran entre les œuvres d'art et ceux qui se tournent vers elles. Elle oblige chacun à ne juger esthétiquement d'une oeuvre qu'à l'aune d'un jugement politique. Les bons sentiments du moment font la bonne littérature et rien d'autre. J'ai bien peur que, d'une façon diffuse, nous en soyons arrivés à ce point.

5. L'idée que tout est politique n'est pas loin de l'énonciation performative d'Austin. En d'autres termes que l'affirmation du tout est politique soit vrai ou non n'a aucune importance : l'affirmer la tend réelle. Le fait que les gens qui pensent ainsi l'ont emporté (sous la forme du politiquement correct tel que l'avait conceptualisé Leo Strauss) fait que nous sommes largement enfermés dans cette logique.

Ces remarques, je crois, prennent tout leur sens quand il s'agit de se tourner vers le cas Lovecraft ou John Norman (même s'ils ne sont pas cités).


Je suis, voyez-vous, une sorte d’hybride intermédiaire entre le passé et le futur — archaïque dans mes goûts personnels, mes émotions et mes intérêts, mais d’un tel réalisme scientifique en philosophie, que je ne peux supporter d’autre point de vue intellectuel que le plus avancé.
HPL

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